Synopsis
Paris, années 1970, Victor Vauthier sort de prison après trois mois d’incarcération. Il est regretté par ses gardiens. A peine sorti, il entre dans le bar situé en face de la prison de la santé et reprend sa profession: escroc! Il vit avec Camille qu’il fait passer pour son oncle, lui aussi escroc, mais intéressé par l’argent pour pouvoir investir dans une digue qui sauverait le Mont Saint Michel de l’ensablement. Victor est suivi par Marie-Charlotte une psychologue dont il s’éprend. Son père est conservateur du musée de Senlis qui abrite un triptyque du peintre espagnol El Greco. Camille a bien l’intention de profiter de l’aubaine…
CRITIQUE
Du Bébel qui s’amuse et amuse son monde. Cette première collaboration entre Philippe de Broca et le scénariste et dialoguiste Michel Audiard est une réussite. Cette histoire d’escroc, mythomane et séducteur est de très fine facture.
Le personnage que joue Julien Guiomar vient contrebalancer le personnage de Jean-Paul-Belmondo. Il donne à son personnage de la profondeur ainsi qu’une mélancolie poétique.
On rit des élucubrations de Victor Vauthier qui mène plusieurs escroqueries à la fois sans aller au bout d’une seule. Il va dans tous les sens sous de multiples déguisements, tombe les femmes, et finit par rentrer au bercail (une caravane en bois posée sur un terrain vague de la banlieue parisienne) dépité mais prêt à recommencer dès le lendemain…
Ce qui amène Camille (Julien Guiomar) à propos des inconséquences de Victor et de ses gesticulations « Ta vie court comme une eau vive ! Faut dire que la mienne fuit comme un vieux robinet« .
Le réalisateur parvient à nous faire interroger sur cet homme qui court, qui court d’une intrigue à l’autre mais en vain. C’est un escroc peu motivé par l’argent mais plus par l’expression de sa mythomanie et le goût du déguisement.
Comme les personnages de « L’homme de Rio » et « Les tribulations d’un chinois en Chine« , à la fin de l’histoire le héros du film se retrouve comme au début du film. Toutes les aventures vécues n’auront pas servies ou enrichies le personnage. L’arc narratif fait une boucle complète.
Le film comme souvent chez Philippe de Broca a beaucoup de rythme. Et Jean-Paul Belmondo se régale (et nous régale) par ses travestissements, ses changements de ton ou d’accents brusques.
Les dialogues de Michel Audiard fusent et font mouche. Julien Guiomar et Jean-Paul Belmondo s’en donnent à cœur joie avec les mots de l’auteur.
Quant à Jean-Paul Belmondo il exulte. Ses clowneries sont grandioses. Il parvient même à faire échapper à Capucine un fou rire conservé au montage final.
Un petit mot sur Geneviève Bujold: L’actrice canadienne fait une belle prestation et permet elle aussi de poser un peu le personnage joué par son partenaire.
Le casse du musée est sans doute moins bien réussi car accumule les scènes répétitives, mais la fin est admirable chose rare pour une comédie française.
Georges Delerue écrit une musique à la fois gaie et grave en rapport aux failles du personnage principal. Du grand art.
Une des meilleures comédies de Philippe de Broca et une des meilleures comédies françaises. La sortie du film sera plus problématique. La typographie de l’affiche étant cause d’une brouille de 25 années entre Philippe de Broca et Jean-Paul Belmondo.
LA SCÈNE D’ANTHOLOGIE
Victor Vauthier rejoint Marie-Charlotte à l’opéra habillé comme Mandrake. Haut de forme, cape et chemise à jabot. Mais à peine installé il reconnaît la cantatrice qui s’avèrera être nymphomane et part la rejoindre dans les coulisses. Scène très réussie.
L’ANECDOTE
Philippe de Broca voulait en générique de début un homme qui enlève des masques différents les uns derrière les autres tout en vieillissant au fur et à mesure pour finir sur un masque de mort. Refus horrifié de la production peureuse de l’effet désastreux sur les spectateurs. Le générique se déroule donc tristement sur le mur de la prison de la Santé à Paris.