Synopsis

Années 2000 dans les quartiers déshérités de Naples de Scampia et Secondigliano, la camorra régit le quotidien de milliers d’habitants. 4 histoires liées à l’emprise de la camorra sur la drogue, le traitement des déchets toxiques, le trafic d’armes, le recrutement de jeunes camorristes, la mainmise sur certains pans de l’industrie (notamment textile), et la distribution de l’argent sale dans les foyers ayant un homme en prison, ou un retraité de la camorra, ainsi que les guerres claniques qui secouent l’organisation..

CRITIQUE

Le film est l’adaptation d’un livre reportage ayant le même intitulé écrit par Roberto Saviano.

Le livre très documenté ayant eu un succès énorme en Italie, l’auteur n’a pas tardé à être menacé de mort par la camorra. Aujourd’hui héros national en Italie pour sa lutte contre la camorra, couvert de prix, et bien entendu critiqué par l’inénarrable Silvio Belusconi (soupçonné de collusion mafieuse et qui n’en n’est pas à une faute de gout près), il reçoit le soutien de l’écrivain et philosophe Umberto Eco.
Matteo Garrone décide de porter sur grand écran ce récit anti-camorriste.

On ne peut pas dire que le film soit euphorisant.
Bien au contraire.
Le spectateur est toujours sous tension.
Dès le début du film qui commence par un massacre dans un sauna et salon de bronzage, des scènes d’une violence fulgurante et sèche font irruption au long du film. La dernière demi-heure qui conclut chacune des 4 histoires finit en paroxysme de meurtres sanglants et lâches.

Nous ne sommes pas du tout dans la vision romantique (qui a aussi ses vertus) de la mafia vue par Francis Ford Coppola « Le parrain » (« The Godfather« ) (1972), Martin Scorsese « Les affranchis » (« Goodfellas« ) (1990) ou Brian de Palma « Scarface » (1983). Ici pas de héros mafieux auquel il est possible de s’identifier. Ceci est juste bon pour les petits voyous qui veulent marcher sur les plates-bandes de la camorra dans le film et se prennent pour Tony Montana.

Le constat de Roberto Saviano et Matteo Garrone est des plus attristants pour ces quartiers napolitains pourris jusqu’à la moelle physiquement (les immeubles construits à la fin des années 1960 tombent en ruine) et moralement (la jeunesse apprend à vivre avec la camorra, pour la camorra et meurt sans atteindre le plus souvent la vingtaine d’années, tuée par la drogue ou les balles).
Ces noman’s land dans lesquels les habitants survivent des subsides camorristes, est terra non grata pour la police qui ne s’y rend que pour y constater un décès.

Le film montre enfin l’imbrication de la camorra dans l’économie régionale et nationale, qui par l’intermédiaire d’entreprises blanchissent l’argent de la drogue. Ces entreprises se spécialisent pour certaines dans l’enfouissement de déchets à très bas coûts. Quitte à mélanger déchets toxiques et non toxiques et polluer le sol pour des siècles.
Cette « industrialisation » de l’organisation mafieuse napolitaine rend les poursuites judiciaires plus compliquées. Car elle implique des collusions plus ou moins volontaires avec des élus, des chefs d’entreprises et des établissements bancaires.

Film quasi documentaire, tourné en majorité en dialecte camorro-napolitain, mérite d’être vu ne serait-ce que pour voir que si en France en 2012 nous avons la violence des cités Nord de Marseille, Naples ville européenne et sa région vit des heures bien pires.

A voir quand on a le moral!

Je regrette cependant le choix de prendre des extraits de musiques de chansons italiennes ou pop qui certes ancrent le film dans son époque mais avec une composition dédiée à l’oeuvre prive le film d’une identification de la musique au film. Voire d’une sublimation de celle-ci pour son support.

LA SCÈNE D’ANTHOLOGIE

Deux jeunes imbéciles qui figurent sur l’affiche et ne voient pas plus loin que le film « Scarface » ont mis la main sur une cache d’armes et de munitions de la camorra.  Armés d’armes automatiques et hurlant des répliques du personnage de Tony Montana du film de Brian de Palma, les voici en maillot de bains en train de tirer à balles réelles sur une plage désolée. Désolé le spectateur l’est aussi de voir deux crétins manipuler ainsi des armes de guerre comme s’ils étaient dans un jeu vidéo.

L’ANECDOTE

Quelques rôles secondaires et figurants sont des non-professionnels issus de Scampia et Secondigliano.

NOTE : 16/20

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