Synopsis
Los Angeles 1937, Jack Gittes est un détective privé qui a quitté la police quelques années auparavant après une mauvaise expérience dans Chinatown. Une certaine Madame Mulwray vient lui demander de suivre son mari, ingénieur au service des eaux de la ville, et de trouver des preuves sur une relation extraconjugale. Jack Gittes accepte le travail et se lance. Il profite d’un réunion à la mairie au sujet du manque d’eau pour les paysans en cette année de sécheresse. Pour pallier au manque d’eau un barrage doit être construit mais Hollis Mulwray est échaudé par une catastrophe précédente qui a vu la rupture d’un barrage suite à une malfaçon. Il considère que le sol sur lequel va être bâti le barrage est dangereux pour la tenue de l’ouvrage et refuse de participer à sa construction. Quelques jours plus tard il est retouvé mort noyé…
CRITIQUE
Roman Polanski tourne un des plus grands polars des années 1970 et de tous les temps. Il arrive au même niveau que « Le grand sommeil » (« The big sleep« ) (1946) de Howard Hawks par exemple.
L’intrigue est politico-financière et immobilière à laquelle s’ajoute une affaire de mœurs des plus sordides. Le scénario de Robert Towne est à la fois complexe et limpide.
Il se base sur un épisode nommé « Les guerres de l’eau en Californie ». qui vit la ville de Los Angeles entrer en conflit avec les habitants de la vallée de l’Owens qui sont des gardiens de troupeaux et des agriculteurs. La ville de Los Angeles captant par des barrages l’eau de la Sierra Nevada et la détournant pour ses habitants de la vallée de L’Owens. Asséchant les cultures et assoiffant le bétail.
Robert Towne reçut un Oscar pour son travail magnifique.
La reconstitution du Los Angeles des années 1930-1940 est absolument remarquable.
La photographie de John A. Alonzo (1934-2001) rend hommage au travail du décorateur et à celui des costumiers.
La réalisation de Roman Polanski a été demandée par Jack Nicholson auprès du producteur Robert Evans. Roman Polanski accepte il supprime la voix off de Jack Gittes prévue et insiste auprès du scénariste pour qu’il n’y ait pas de happy-end, ce qui créera une tension entre les deux hommes.
Jack Nicholson fait une performance dont il est coutumier, Faye Dunaway laisse une empreinte indélébile au spectateur par sa grâce, et son ambiguïté magnifique. Et John Huston joue en finesse un vieillard qui a toutes les apparences d’un bon père de famille même s’il trempe un peu dans les magouilles immobilières…
Ce film est considéré comme étant, le premier chef d’oeuvre du « néo-noir » (film noir revisité après les assassinats des frères Kennedy et alors que la guerre du Vietnam tourne au cauchemar).
Plus cynique, plus immoral, plus désenchanté, le film noir qui avait dans les années 1960-1970 quitté les Etats-Unis pour la France « Ascenseur pour l’échafaud » (1958) de Louis Malle, « Classe tous risques » (1960) de Claude Sautet et « Le cercle rouge » (1970) de Jean-Pierre Melville puis la Grande Bretagne « La loi du milieu » (1971) de Mike Hodges « Pulp » (1972) revient aux Etats-Unis où il s’est refait une jeunesse et des dents acérées.
Sublime musique de Jerry Goldsmith qui ajoute encore un plus à un film formidable.
LA SCÈNE D’ANTHOLOGIE
Jack Gittes visite avec Evelyn Mulwray une maison de retraite. La plupart des personnes sont propriétaires de centaines d’hectares de terrains et l’ignorent. En effet des escrocs achètent à vil prix avec des noms d’emprunts des terres arides mais bientôt irriguées par un aqueduc.
L’ANECDOTE
Ce film sera le dernier de Roman Polanski tourné aux États-Unis étant poursuivi pour une affaire de mœurs trois ans plus tard. Cette affaire le poursuivra jusqu’en Suisse dans les années 2000.