Synopsis
Années 1830 la nuit est tombée sur les montagnes d’Ardèche tandis qu’il neige. Une diligence chargée de voyageurs approche d’une auberge. Dans cette auberge vit un couple et un serviteur noir. Ils assassinent leurs hôtes pour les dépouiller. La dernière victime date d’il y a quelques heures. C’est un colporteur qui a fait les frais de l’avidité des aubergistes. Dans la diligence se trouve la fille du couple infernal elle aussi complice des agissements de ses parents. Tandis que la diligence arrive à l’auberge, sur un chemin vont à pied un moine capucin et un jeune novice. Ils sont épuisés par leur marche et affamés dans ce froid. Le moine explique au novice qu’ils vont faire une halte dans une auberge renommée…
CRITIQUE
Claude Autant-Lara a toujours été un anticonformiste et a toujours eu le goût de la provocation.Cela l’amènera dans des dérives fascisantes en 1989 et au début des années 1990. Mais nous n’en sommes pas encore là.
Pour adapter un roman d’Honoré de Balzac inspiré d’un fait divers connu sous le nom d’auberge de Peyrebeille, il fait appel alors a un duo de scénaristes Jean Aurenche et Pierre Bost associés sur une bonne trentaine de films et eux aussi grands pourfendeurs de l’embourgeoisement.
Après d’infructueuses tentatives, ils décident d’abandonner le roman et écrivent une histoire quasi originale.
Et bien entendu en voyant ce film il ne fait aucun doute que c’est une des meilleures comédies grinçantes et cyniques que la France ait produite.
Alors il est vrai que de nos jours le film a quelques aspects vieillots dans sa façon de dire le texte chez les acteurs.
Mais l’humour noir, la transformation de la salle de restauration en Enfer, le mariage à la hâte sous un concert de ronflements, l’esprit anarchisant et plus que l’anticléricalisme : l’athéisme vindicatif traversent le film et font éclater de rire les spectateurs.
Les scènes filmées dans l’escaliers de l’auberge sont tout à fait remarquable. Notamment les contre plongées sur le nègre Fétiche lui donnent des airs lucifériens très réussis.
L’interprétation de Fernandel est un de ses plus remarquables. Bien supérieure à celle qu’il fera pour la saga des « Don Camillo ».
Francis Girod qui fit l’éloge de Claude Autant-Lara quand il le remplaça à L’Académie des Beaux Arts raconte que pour l’acteur habitué à codiriger la réalisation du film, n’ a pas eu son mot à dire et fit ce film un peu à son corps défendant.
Il n’empêche que la performance est là. Et que ce moine pris dans le piège du secret du confessionnal et qui ne peut dénoncer les aubergistes est absolument savoureux.
Françoise Rosay et Julien Carette sont aussi grandioses dans le rôles du couple d’assassin. Il est dommage que les jeunes amoureux ne soient pas à la hauteur, et le film perd un peu de sa superbe quand l’un ou l’autre entre en scène.
Il faut noter que le générique est chanté par Yves Montand qui pour l’occasion roule les « r » avec délectation.
LA SCÈNE D’ANTHOLOGIE
La femme de l’aubergiste tient absolument à profiter de la venue du moine pour se confesser. A la fois pour soulager sa conscience mais surtout pour s’assurer du silence du moine tenu par le secret du confessionnal. C’est à travers une grille pour faire cuire les châtaignes que la matrone dévoilera malicieusement ses inavouables crimes.
L’ANECDOTE
Claude Autant-Lara, Pierre Bost et Jean Aurenche ont été vilipendés dans les cahiers du cinéma par les jeunes loups de ce qui sera « La nouvelle vague« . Et si effectivement ils faisaient un cinéma de studio souvent adapté de romans et donc peu ancré dans la société des années 1960, une chose est certaine ils étaient bien meilleurs scénaristes et dialoguistes que les François Truffaut et consort.