Synopsis
Sicile, ville de Modica en 1935. Aldo Piscitello père de famille d’un grand fils, d’une fille qui sort de l’adolescence et de deux jumeaux, travaille à la mairie. Il est sommé par le maire de s’inscrire au parti fasciste sous la menace de perdre son emploi. Sa femme l’encourage séduite par la doctrine de Mussolini, le pousse à adhérer au parti du Duce. Ses amis lui conseillent de suivre sa conscience. Aldo adhère donc au parti fasciste. Tandis que son fils revient de 18 mois de service militaire avec la ferme intention d’épouser la fille du pharmacien antifasciste, sa fille est amoureuse du fils du maire fasciste convaincu…
CRITIQUE
Ce film est l’adaptation d’un roman de Vitaliano Brancati qui a donc participé au scénario. Sur le ton de l’ironie plus que de la comédie et très peu d’années après la libération de l’Italie, les scénaristes décrivent la complaisance des italiens avec le fascisme.
Le film se déroule sur plus de 20 années. Les guerres qui ont traversé les années fascistes (Lybie, Espagne, France, Albanie, Russie, puis libération de la Sicile) rythment le film. Il montre aussi avec acuité que les élites fascistes s’en sortent bien mieux que le petit peuple quand il s’agit de faire une « épuration ».
Ainsi le pauvre Piscitello qui n’est pas fasciste pour un sou, non belliqueux affirmé et qui ne se supporte pas en uniforme noir, paye très cher son adhésion au parti fasciste qui pour lui consistait à conserver son métier et nourrir les 6 bouches de sa famille. Tandis que le maire de la ville qui retourne sa veste allègrement au sens du vent politique continue à exercer le pouvoir.
Très bon film de Luigi Zampa peut-être son meilleur, « Les années difficiles » est un film qui n’entre pas dans les canons de la comédie à l’italienne car le héros est positif. Le début du film fonctionne sur les ressorts de la comédie. Mais dès l’entrée des conflits le ton est bien plus amer et le spectateur sent se profiler le drame qui va s’abattre sur le petit fonctionnaire municipal.
Luigi Zampa (1905-1991) issu de famille modeste et antifasciste (son père cheminot fut rétrogradé pour avoir suivi une grève sous le fascisme) a expliqué que ce qu’il filmait le mieux ce sont ces petites gens malmenées par les soubresauts de l’histoire et qu’il avait été témoin de ce genre de comportement.
Umberto Spadaro (1904-1981) acteur sicilien, est magnifique. Il porte le film sur ses épaules avec un certain brio.
La musique de Francesco Casavola (1891-1955) accompagne fort bien les images. Le musicien est aussi connu pour des œuvres d’opéras comiques et sur la fin de sa vie plus dramatiques.
LA SCÈNE D’ANTHOLOGIE
Lors de la représentation de « Norma » opéra de Vincenzo Bellini sur un livret de Felice Romani, quelques fascistes zélés trouvent que le livret écrit en 1831 va à l’encontre de l’idéologie fasciste sur la grandeur de Rome. A la va-vite ils réécrivent les passages incriminés. Scène sur la bêtise humaine.
L’ANECDOTE
Le film a été très mal reçu par le milieu politique et par les médias. Film qualifié par ces élites comme anti-italien. La connerie, infatigable, toujours à l’oeuvre.