Synopsis
Strasbourg années 2010 Alessandro est professeur de musique baroque à la fac. Il est veuf depuis plus de dix ans et élève sa fille Irina comme si elle avait encore 5 ans. Son frère vit chez lui et refuse de sortir tant que Silvio Berlusconi reste au pouvoir. Alessandro est aussi chanteur dans un groupe baroque et lecteur dans un hôpital pour les malades graves ou en phase terminale. Il s’est pris d’amitié pour Agathe qui est atteinte d’un cancer. Alessandro ne parvient pas refaire sa vie, et les relations avec sa fille sont de plus en plus tendues. Il décide de l’emmener chez une psy…
CRITIQUE
Enfin une comédie française qui remplit son contrat sans une once de vulgarité et de jeu outré de la part des acteurs.
Il faut dire que l’inspiration vient plus de chez Mario Monicelli ou Pietro Germi que de chez Gérard Oury ou Jean-Marie Poiré. L’humour y est à la fois subtil et constant tout en consacrant des scènes à l’émotion. Le tout harmonieusement agencé.
Le film prend parfois son temps mais ce n’est jamais en vain, chaque scène est précieuse et se savoure.
Stefano Accorsi développe une palette dans son interprétation de clown blanc assez impressionnante: il danse sur les tables avec brio, il chante magnifiquement des airs baroques, et lit des romans grivois à un vieil érotomane en phase terminale le plus sérieusement du monde.
Il s’accroche à la photo de sa femme décédée et a beaucoup de mal à donner de mauvaises notes à ses élèves. Mais il ne sait pas lâcher la bride à sa fille qu’il élève seul depuis 10 ans, et qui a maintenant 15 ans et grand soif d’émancipation.
La révélation du film est Neri Marcorè en Auguste, anar et immature qui regarde des séries télé américaines emplies de blondes vulgaires, peint des téléphones portables à côté de pommes, inscrit son frère sur un site de rencontre et tchatte à sa place, instille des idées révolutionnaires chez les flics et les postières et demande l’asile politique tout en sollicitant le tribunal international pour faire condamner Silvio Berlusconi à des crimes improbables.
De même la bande d’amis qui entoure Alessandro est remarquablement bien distribuée.
Enfin Anouk Aimée et Clotilde Courau sont toutes deux bouleversantes. Elles amènent les scènes d’émotions sans leur donner un pathos indigeste.
Les choix musicaux du film sont aussi des soleils. Les tarentelles illuminent ce film de tout leur éclat malgré leur 5 siècles existence. Philippe Claudel qui ne m’avait pas emballé avec son premier opus « Il y a longtemps que je t’aime » reprend la main et m’encourage à suivre cet auteur sensible.
LA SCÈNE D’ANTHOLOGIE
Alessandro va voir l’infirmière pour que celle-ci la prévienne quand Agathe sera décédée. Il a beaucoup de mal à trouver les mots pour parler de la mort. Scène très touchante.
L’ANECDOTE
Le film rend un hommage au film de Henry Hathaway « Peter Ibbetson » (1935) avec Gary Cooper, Ann Harding et Ida Lupino. Dans ce film il est question d’un homme qui a perdu sa femme et la retrouve dans ses rêves, jusqu’à ce qu’il décède et la retrouve pour de bon. Film très apprécié par les surréalistes pour ses scènes oniriques.